AU JAPON, UN VILLAGE PROPOSE AUX TOURISTES DE PRODUIRE L'ACIER RARE DES SABRES TRADITIONNELS

Une autre façon de découvrir le Japon : enfiler une combinaison puis reproduire les gestes traditionnels de la fabrication de tamahagane, l’acier utilisé pour les sabres.

Cela ressemblerait presque à un nom de plat exotique : le tamahagane. Malheur pourtant à quiconque serait tenté d’y goûter : le tamahagane désigne un type d’acier rare, dont la particularité est d’avoir une teneur forte en carbone, et qu’on utilise depuis des siècles pour la confection des sabres japonais.

Dans la préfecture de Shimane, le village de Yoshida a longtemps été le berceau de cette activité sidérurgique traditionnelle. Mais le développement de nouvelles techniques, moins onéreuses et plus efficaces, a engendré au XXe siècle la fermeture de ses nombreuses forges et dépeuplé progressivement la région. Si 15.000 habitants vivaient à Yoshida autrefois, ils sont dix fois moins aujourd’hui.

Un jour et une nuit de travail

Pour remédier à cette fuite des populations et braquer à nouveau les projecteurs sur ce savoir-faire traditionnel, le village a mis en place des sessions de confection d’acier ouvertes aux touristes. Pendant 24 heures, ces derniers sont invités à participer à toutes les étapes d’une production de tamahagane. Un appel auquel a répondu le journaliste Craig Mod du New York Times, et qui fait aujourd’hui le récit de son étonnante expérience.

Au sein d’un groupe d’une vingtaine de touristes– composé à la fois de Japonais et d’étrangers– il a d’abord enfilé une combinaison de sécurité. Tous, ensuite, se sont relayés pendant un jour et une nuit pour hacher du charbon de bois puis le verser, avec du sable de fer, dans les flammes d’un tatara.

Le tatara est un grand fourneau traditionnel à ciel ouvert, posé sur un socle en béton, à l’intérieur duquel la température avoisine les 1300 degrés. Maintes fois répétés, et sous la supervision d’un chef d’orchestre japonais, les gestes ont permis de façonner un morceau de tamahagane d’une grosse centaine de kilos. Juste avant d’allumer le feu, un prêtre shintoïste avait béni la pièce qui abrite le fourneau…

Un "pilier du développement de la ville"

Pour s’offrir cette drôle d’expérience, les touristes ont dû débourser 200 000 yens japonais (soit environ 1 200 euros). Une somme conséquente au regard des cadeaux offerts en souvenir (ils ont pu repartir avec leur combinaison ainsi qu’un petit morceau d’acier…). Mais la récompense est ailleurs.

Avec cette expérience, les participants ont d’abord encouragé la revitalisation de la préfecture de Shimane, qui fut une des moins visitées au Japon en 2019 (malgré la présence du sanctuaire Izumo). "Nous considérons le tatara comme un symbole mais aussi comme un pilier du développement de la ville" confirme Yuji Inoue de la société Tanabe, qui supervise ces sessions ouvertes au public.

L’exercice, en outre, leur a permis de découvrir le Japon hors de sentiers battus, alors que de nombreux sites du pays (Kyoto, Fuji, Miyajima…) souffrent de la surfréquentation touristique .

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